Cinéaste tardif, journaliste culturel abrasif, enseignant dépressif et amateur de rimes en if, Quentin Lewis s’est dit qu’il allait faire un blog. Parce qu’il paraît que les blogs sont hyper populaires de nos jours chez les jeunes à la pointe de la technologie. Ceux qui s’envoient des textos, passent leurs journées sur MSN ou téléchargent le dernier épisode de la Trilogie du Samedi sur eMule. Il a aussi remarqué qu’écrire sur lui à la troisième personne dans une présentation en ligne faisait plus classe.
J’ai pourtant toujours préféré l’école en été, quand il n’y avait aucune classe. Je vais donc laisser la troisième personne au dernier survivant du Clan des Siciliens et vous expliquer brièvement de quoi il retourne. Parce que voyez-vous, je suis un écriveur compulsif (pour détourner les mots des P. Desproges et autres J. Berroyer de cette planète, grands explorateurs de notre langue qui ont su rendre ce monde un peu moins laid qu’ils l’ont trouvé au gré de leurs belles lettres).
En attendant de détailler ici plusieurs projets dont il me tarde de vous faire part, je vous laisse ces quelques écrits rédigés par ma personne, publiés par moi-même à titre posthume avec un peu d’avance. Une poignée d’essais fictionnels ou critiques, un ou deux pamphlets égarés et beaucoup trop d’articles sur la culture sous toutes ses formes. Qu’elle soit sarcophaguée sous la vitrine rutilante d’un musée ou qu’elle fasse POP quand on tente de l’extirper du quotidien des petites gens. Car c’est bien cette différence hiérarchique qui sépare les arts nobles de ceux qui ne valent pas encore cette appellation. Alors que dans le fond, la culture populaire d’aujourd’hui n’est-elle pas la culture classique de demain ?
Pourtant, ce rejet des cultures les plus populaires n’est pas une chose nouvelle dans le pays d’Eugène Sue. Il s’agit presque d’un sport national, aussi vieux que la Monarchie de Juillet. Et la façon qu’on a de pointer du doigt les conséquences prétendues de nos jeux vidéo violents ou des séries trop subversives sur notre société n’est pas sans rappeler la frénésie d’une autre époque où l’expressionnisme allemand allait bientôt être considéré comme un « art dégénéré ». Quelques années plus tôt, le procès d’intention subi par l’Ulysse de James Joyce aurait quant à lui de quoi titiller nos zygomatiques de femmes et d’hommes modernes. Mais un rapide coup d’œil à notre paysage actuel suffit à faire retomber nos commissures. Qu’importe si l’on réside à gauche ou à droite du spectre politique, balayer devant notre porte en ce moment n’a rien de bien réjouissant. Pris en sandwich par cet appel à la censure provenant des deux côtés, j’ai préféré répondre à un autre appel : celui de l’aventure. Cette envie pressante de mettre les voiles constitue l’origine même de ce blog.
Voyez-vous, on a érigé des très grosses pierres autour de notre culture, pour s’assurer qu’elle ne soit pas accessible à tous. Et ce n’est pas mon incursion dans le monde universitaire français qui m’a délesté de cette notion, bien au contraire. J’y ai découvert un temple occulte où la connaissance est conservée cupidement. À la façon d’un joyau inestimable qui ne pourrait être touché que par quelques initiés. Les autres, ce sont ceux qui meurent d’ennui en voulant s’en approcher. Les non-méritants, détournés de ce trésor par ceux qui manient les effets de langue pompeux pour dissimuler la vacuité de leur propos. Mais n’aie crainte, cher lecteur ! En véritable flibustier des temps modernes, j’ai bravé tous les dangers pour tenter de m’en approcher. Mais ce n’est pas là que résidait le véritable risque. Je suis convaincu qu’atteindre la culture académique est à la portée de tous, du moment qu’on sache où sont situés les pièges mortels et quelles dalles déclenchent les dards soporifiques. Non, la vraie difficulté, c’est de revenir de cette jungle funeste.
Les quelques écrits que j’ai pu rapporter avec moi de ce voyage périlleux en sont la preuve. J’ai fait de mon mieux pour me tailler un chemin parmi les lierres pernicieuses de l’académisme français ou en tentant de m’infiltrer laborieusement parmi les mauvaises herbes 2.0 qui ont envahi le paysage du journalisme moderne (plus connues sous le nom de bâtonnage). Hélas, il m’a fallu constater que les vieux adages mentent, et la plus acérée des plumes reste moins redoutable qu’une machette. Surtout face aux serpents venimeux et mygales rampantes qui m’encerclent au moment de rédiger ces dernières lignes.
Me sachant condamné, j’ai malgré tout pu envoyer des bouteilles à la mer au fil des années. Ainsi, le but de la rubrique « Écrits » de ce site n’est pas de constituer un corpus exhaustif. Il s’agit plutôt de lancer un filet de pêche pour essayer de rattraper quelques-unes d’entre elles. Une tentative de drainer toute l’encre déversée vainement au fil des années dans un océan de pixels. Les expérimentations d’une frivole « sériosité » adressés à celles et ceux qui aiment faire des pas de côté quand on leur intime de filer droit. Et qui préfèrent gratter le vernis des choses quand on leur demande de se cantonner à leur surface. Juste histoire de voir ce qui se cache en-dessous…
Crédits collage : À une époque où les artistes de tous poils sont menacés par l’usage que font certains idiots authentiques de l’intelligence artificielle, l’envie de me mettre à la colle avec une belle paire de ciseaux devenait de plus en plus excitante. Alors que les mal-nommés « I.A. artists » n’ont aucun moyen de savoir qui ils plagient, je découpe des trucs dans l’espoir de dénuder les épaules des géants sur lesquelles nous nous hissons. Il y a d’abord le logo officieux du site issu du magazine Famous Monsters of Filmland, dans lequel le maquilleur de cinéma Dick Smith apprenait aux enfants comment élaborer eux-mêmes leurs propres maquillages monstrueux. Mais aussi Pierre Tchernia, Bram Stoker, Milicent Patrick, John Tenniel, George Lucas, James Joyce, René Goscinny, Patrick McGoohan, Peter Cushing, Verity Lambert, Terry Gilliam et les autres. Sans oublier les magazines qui ont fait leur temps (The Adventurer, Player One), ceux qui auraient mérité de durer plus longuement (Midi Minuit Fantastique, Pilote, St-Cinema des Pres, Star Ciné Cosmos) et l’un des rares à résister encore et toujours à l’envahisseur (Mad Movies).